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« Un seul être vous manque et tout est dépeuplé »


Réduire Wrong à un collage de saynètes surréalistes serait mal jauger le talent de Quentin Dupieux réalisateur qui, s’il cultive un certain goût pour l’aléatoire, le décalé, l’improbable et le n’importe quoi, parvient à imposer un univers singulier dans le paysage cinématographique Français depuis sa première réalisation ( "Nonfilm" en 2001 ).  Et si faire abstraction de tout raisonnement intellectuel parait être la meilleure solution pour appréhender son travail, son nouveau bébé déroge (quelque peu) à cette règle : Tout le non-sens invoqué dans Wrong n’entache en rien la crédibilité et la cohérence d’un film par ailleurs très soigné visuellement. La nuance est subtile mais a toute son importance.


La crédibilité n'est pas la vraisemblance.


Dupieux dépeint avec culot et maîtrise les dérèglements du quotidien, ces instants où notre perception du monde est profondément modifiée par un évènement causal initial ( la disparition du chien de Dolph ) faisant de nous les victimes d'une histoire dans laquelle l'absurde et l'inconnu s'introduisent volontiers à notre insu . Cette perversion des repères empêche toute idéologie normative et va même jusqu’à brouiller l’identité (La manière avec laquelle Emma confond Victor avec Dolph est assez déconcertante)


Le non-sens régie donc le monde diégétique de Wrong de la même manière qu’il s’immisce dans nos propres vies sans prévenir, et même si certaines scènes ne valent que pour elles-mêmes, Wrong ne sombre pas dans un cynisme poseur et arty.


Oui mais voilà, l’incongruité de la matière visuelle ( et sonore ) que Dupieux déploie désamorce tout potentiel dramatique, poussant le spectateur à « digérer » les séquences les unes après les autres sans en attendre forcément beaucoup d’un point de vue émotionnel, ce qui nuit indéniablement au rythme et étire le film en longueur. Cette remarque objective les limites du procédé, qui, même s’il existe bien au-delà de son apparente vacuité, finit indéniablement par s’essouffler passer l’heure de film, poussant le spectateur à regarder sa montre qui, elle, n’affichera pas 07h60.

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